Eloge funèbre de Pierre Mauvais-Jarvis

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par les Professeurs Frédérique Kuttenn et Jean-François Moreau, anciens chefs de service de l'hkôpital Necker.

paru dans le journal Le Monde

 

Pierre Mauvais-Jarvis (1929-2012),  professeur émérite d'Endocrinologie à l'Université Paris 5 René Descartes, Médecin des hôpitaux honoraire chef du service d'Endocrinologie et Médecine de la Reproduction de l'Hôpital Necker de 1975 à 1994, fut le fondateur et le pilote d'une Ecole de Médecine d'Endocrinologie de la Reproduction reconnue en Europe et outre-Atlantique,

Successivement interne des Hôpitaux de Paris (promotion 1954) puis chef de clinique, Pierre Mauvais-Jarvis entra à l'INSERM en 1963 comme chargé de Recherches dans l'équipe d'Emile-Etienne Baulieu (unité 33). Novateur, il le fut toujours. Minoritaire en son temps, il fit le choisit du Temps-Plein clinique dès sa nomination hospitalo-universitaire. Quand peu s'y consacraient, decida d'y allier la Recherche, réussissant ainsi la synthèse entre ces deux pôles, l'un inspirant et fertilisant l'autre.

Dans un monde médical foisonnant et en pleine ébullition, à la Pitié-Salpêtrière, il fit converger deux courants complémentaires : l'Endocrinologie de Jacques Decourt et la Biochimie Hormonale de Max-Fernand Jayle pour créer l'Endocrinologie de la Reproduction dès sa titularisation à Necker en 1975. Cette promotion dont les articles du Monde conservent la trace, fut un un tremplin qui lui permit de porter la Gynécologie Médicale, initiée là par Albert Netter auquel il succéda en en gardant l'équipe[i], à un niveau universitaire d'excellence de dimension vite internationale.

            Pierre Mauvais-Jarvis fut à l'origine d'avancées majeures dans la compréhension des mécanismes d'action des androgènes et de la différenciation sexuelle. Il a permis de progresser dans le domaine de la physiopathologie des maladies du sein, et il a ouvert la voie à des thérapeutiques préventives du cancer du sein. Il a été pionnier dans le développement de l'administration par la peau des hormones sexuelles, en particulier dans le développement de l'estradiol percutané pour le traitement de la ménopause.

            Il est reconnu comme le créateur de l'école de Médecine de la Reproduction qui reçut sa consécration à travers le Diplôme d'Etude Spécialisée du même nom.

            Credité de plus de 500 publications et de cinq livres, il fut président de plusieurs sociétés savantes en endocrinologie, en gynécologie et en sénologie. Il fut membre du Conseil National des Universités de 1975 à 1994.

            Médecin ouvert à tous les progrès techniques, il s'associa au service de radiologie en y lui délégant Dr Nicole Sterkers (†)[ii] pour jouer un rôle capital dans l'éclosion novatrice d'une école de radiologie de la Femme à Necker dès 1978 qui permit le développement harmonieux de l'imagerie du sein pour donner naissance à l'IMAGERIE DE LA FEMME dès 1990. Avec l'incorporation de nouvelles techniques radiologiques de pointe, comme le doppler, le CT-scanner et l'IRM, l'école d'imagerie de la Femme de Necker est devenue une des grandes pionnières, générant des leaders internationaux reconnus en Europe et dans le monde entier.

Était-il un mandarin ? En avance sur les notions de parité, il s'entoura principalement de femmes à lui toutes dévouées et de quelques hommes comme lui avant gardistes et tous motivés par la philosophie du Women's Lib. Ce grand libéral[iii] a marqué ses nombreux élèves, collaborateurs et amis par l'acuité de son  jugement, l'originalité de sa pensée, l'une et l'autre servies par une brillante intelligence et une culture humaniste qui se manifestaient extérieurement avec pudeur. Il sut donner sa chance à des idées qui n'étaient pas toujours les siennes, telle la liberté donnée au Dr Jacqueline Mandelbaum de féconder in vitro les gamètes à l'origine du second bébé éprouvette français mis au monde par le Dr Jean Cohen en 1982[iv]. Il était aussi animé par une flamme artistique, comme en témoignaient les œuvres originales couvrant les murs du pavillon Apert[v], bâtiment supposé provisoire aux allures désuètes et surannées qu'il avait presque réussi à rendre coquet. C'était un esprit en mouvement permanent, insoumis et rebelle aux idées reçues, et par-dessus tout dominé par la rigueur de sa pensée. Aussi et au-delà, avec son caractère impétueux, rude d'abords, voire abrupt au quotidien, sa générosité était incommensurable dès lors qu'authentique dans sa démarche et fécond dans ses projets, on savait briser la glace. PMJ était l'inverse d'une profiterole : enveloppe froide et cœur chaud.

Si le temple de la gynécologie médicale a quitté l'hôpital Necker pour d'autres horizons, l'école de Pierre Mauvais-Jarvis a notamment fructueusement essaimé à l'Hôtel-Dieu, la Pitié-Salpêtrière, à Brest et autres lieux fortunés, publics ou privés. Franck, son fils aîné, a repris le flambeau et poursuit l'œuvre de son père sur le front du traitement des maladies métaboliques à la Northwestern University de Chicago.

         

 

 

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